Skip to content

Partager

Accueil > Sentience > La déclaration de Cambridge sur la conscience

La déclaration de Cambridge sur la conscience

lundi 24 mars 2014, par Association Sentience

Nous vous livrons ci-dessous la traduction de l’importante Déclaration de Cambridge sur la conscience par laquelle d’éminents chercheurs réévaluent l’expérience consciente et les comportements des animaux non humains.

Par cette déclaration, d’éminents scientifiques soutiennent que si la conscience existe, les données scientifiques montrent que de nombreux animaux, autres que les humains, sont capables de la produire.

Vous pouvez retrouver les enregistrements vidéos et une présentation des différents scientifiques signataires sur le site internet fcmconference.org.

Traduction française réalisée par François Tharaud, issue du site Les Cahiers antispécistes.

La Déclaration de Cambridge sur la conscience a été rédigée par Philip Low et révisée par Jaak Panksepp, Diana Reiss, David Edelman, Bruno Van Swinderen, Philip Low et Christof Koch. La Déclaration a été proclamée publiquement à Cambridge (Royaume-Uni) le 7 juillet 2012 lors de la Francis Crick Memorial Conference on Consciousness in Human and non-Human Animals, au Churchill College de l’Université de Cambridge, par Low, Edelman, et Koch. La Déclaration a été signée par les participants à ce colloque le soir-même, en présence de Stephen Hawking, dans la Salle Balfour de l’Hôtel du Vin de Cambridge. La cérémonie de signature a été filmée par CBS 60 Minutes.

[Le texte explicatif ci-dessus figure à la fin de la déclaration dans l’original anglais]

Aujourd’hui, le 7 juillet 2012, un groupe d’éminents chercheurs en neurosciences cognitives, neuropharmacologie, neurophysiologie, neuroanatomie et neurosciences computationnelles se sont réunis à l’Université de Cambridge pour réévaluer les substrats neurobiologiques de l’expérience consciente et des comportements afférents chez les animaux humains et non-humains. Bien que la recherche comparative sur ce sujet soit naturellement entravée par l’incapacité des animaux non-humains, et souvent humains, à communiquer facilement et clairement leurs états internes, les faits suivants peuvent êtres affirmés sans équivoque :

Le champ des recherches sur la conscience évolue rapidement. Un grand nombre de nouvelles techniques et stratégies de recherche sur les sujets humains et non-humains a été développé. Par conséquent, de plus en plus de données sont disponibles, ce qui nécessite une réévaluation régulière des conceptions régnantes dans ce domaine. Les études sur les animaux non-humains ont montré que des circuits cérébraux homologues corrélés avec l’expérience et la perception conscientes peuvent être facilités et perturbés de manière sélective pour déterminer s’ils sont réellement indispensables à ces expériences. De plus, chez les humains, de nouvelles techniques non-invasives sont disponibles pour examiner les corrélats de la conscience.

Les substrats cérébraux des émotions ne semblent pas restreints aux structures corticales. En réalité, les réseaux de neurones sous-corticaux excités lors d’états affectifs chez les humains sont également d’une importance critique pour l’apparition de comportements émotifs chez les animaux. L’excitation artificielle des mêmes régions cérébrales engendre les comportements et les ressentis correspondants chez les animaux humains et non-humains. Partout où, dans le cerveau, on suscite des comportements émotifs instinctifs chez les animaux non-humains, bon nombre des comportements qui s’ensuivent sont cohérents avec l’expérience de sentiments, y compris les états internes qui constituent des récompenses et des punitions. La stimulation profonde de ces systèmes chez les humains peut aussi engendrer des états affectifs similaires. Les systèmes associés à l’affect sont concentrés dans des régions sous-corticales dans lesquelles les homologies cérébrales sont nombreuses. Les jeunes animaux humains et non-humains sans néocortex possèdent néanmoins ces fonctions mentales/cérébrales. De plus, les circuits neuronaux nécessaires aux états comportementaux/électro-physiologiques de vigilance, de sommeil et de prise de décision semblent être apparus dans l’évolution dès la multiplication des espèces d’invertébrés ; en effet, on les observe chez les insectes et les mollusques céphalopodes (par exemple les pieuvres).

Les oiseaux semblent représenter, par leur comportement, leur neurophysiologie et leur neuroanatomie, un cas frappant d’évolution parallèle de la conscience. On a pu observer, de manière particulièrement spectaculaire, des preuves de niveaux de conscience quasi-humains chez les perroquets gris du Gabon. Les réseaux cérébraux émotionnels et les microcircuits cognitifs des mammifères et des oiseaux semblent présenter beaucoup plus d’homologies qu’on ne le pensait jusqu’à présent. De plus, on a découvert que certaines espèces d’oiseaux présentaient des cycles de sommeil semblables à ceux des mammifères, y compris le sommeil paradoxal, et, comme cela a été démontré dans le cas des diamants mandarins, des schémas neurophysiologiques qu’on croyait impossibles sans un néocortex mammalien. Il a été démontré que les pies, en particulier, présentaient des similitudes frappantes avec les humains, les grands singes, les dauphins et les éléphants, lors d’études de reconnaissance de soi dans un miroir.

Chez les humains, l’effet de certains hallucinogènes semble associé à la perturbation du feedforward et du feedback dans le cortex. Des interventions pharmacologiques chez des animaux non-humains à l’aide de composés connus pour affecter le comportement conscient chez les humains peuvent entraîner des perturbations similaires chez les animaux non-humains. Chez les humains, il existe des données qui suggèrent que la conscience est corrélée à l’activité corticale, ce qui n’exclut pas d’éventuelles contributions issues du traitement sous-cortical ou cortical précoce, comme dans le cas de la conscience visuelle. Les preuves d’émotions provenant de réseaux sous-corticaux homologues chez les animaux humains et non-humains nous amènent à conclure à l’existence de qualia affectifs primitifs partagés au cours de l’évolution.

Nous faisons la déclaration suivante : « L’absence de néocortex ne semble pas empêcher un organisme d’éprouver des états affectifs. Des données convergentes indiquent que les animaux non-humains possèdent les substrats neuroanatomiques, neurochimiques et neurophysiologiques des états conscients, ainsi que la capacité de se livrer à des comportements intentionnels. Par conséquent, la force des preuves nous amène à conclure que les humains ne sont pas seuls à posséder les substrats neurologiques de la conscience. Des animaux non-humains, notamment l’ensemble des mammifères et des oiseaux ainsi que de nombreuses autres espèces telles que les pieuvres, possèdent également ces substrats neurologiques. »